Paul-André Proulx

Littérature Québecoises


Marcotte, Véronique.

Aime-moi. Éd. VLB, 131 p.

La Mythomanie

En introduction, l'auteure précise que cette œuvre découle d'un fait vécu. L'information vise moins à créer de l'intérêt pour cette histoire vraie qu'à donner de la crédibilité à un récit que l'on classerait plutôt dans un créneau fantastique.

L'héroïne est issue d'un milieu familial lourdement perturbé par une secte, dont les sévices à l'égard des enfants sont inqualifiables. Ils sont soumis à des dérèglements sexuels, voire même entraînés vers une mort horrible. Maëlle échappe miraculeusement aux mains de ses tortionnaires pour finalement être confiée à une femme empathique.

L'enfer se referme sur l'une pour mieux s'ouvrir sur l'autre. Accueillir une autiste légère de surcroît ne rend pas la tâche facile à une bienfaitrice résolue à combler les carences affectives de sa protégée. Crises de dissociation, tentative de suicide, tout y passe pour l'attacher exclusivement au service de la malheureuse. Cet attachement sans répit épuise Judith, qui tente de cheminer avec Maëlle vers une paix intérieure. Tâche qui devient impossible quand on veut se faire le sauveur d'une mythomane. Le mensonge n'indique que de fausses pistes. Des pistes qui ne peuvent que les perdre toutes les deux sur le chemin du salut.

Dans ce roman polyphonique, la narration est confiée à deux femmes aveuglées par les stratégies qu'elles mettent en œuvre pour fuir le malaise qui les habite. En fait, intéressée par les troubles mentaux, Véronique Marcotte tente de prouver que l'humanité vit dans une tour de Babel. Objectif atteint de ce point de vue. Tout en contournant le piège doctoral, il est dommage que l'auteure n'ait pas inclus son récit à l'intérieur d'un cadre qui le transcende. C'est sans compter que l'écriture se contente d'être le témoin d'un fait sans l'infléchir dans une démarche plus littéraire.