Gagnier,
Marie.
Console-moi.
Éd.
du
Boréal,
2003,
319
p.
Enfance
marquée
au
fer
rouge
Console-moi
est
une
oeuvre
solide.
L'auteure
nous
entraîne
dans
une
aventure
palpitante,
inspirée
en
premier
lieu
par
le
peuple
acadien
du
18e
siècle,
qui
fut
déporté
par
les
Anglais,
mais
qui
pousse
encore
ses
ramifications
le
long
de
l'Atlantique.
Ce
périple
temporel
sert
à
la
compréhension
de
ces
"
nâmes
de
géants
",
dont
le
mauvais
sort
s'est
acharné
sur
elles
comme
un
vautour.
Un
pêcheur
de
Chéticamp
quitte
la
Nouvelle-Écosse
après
avoir
perdu
son
frère,
sa
femme
et
son
bateau.
Pour
fuir
ses
malheurs,
il
s'établit
avec
son
fils
de
quatre
ans
à
Pointe-aux-Trembles,
un
arrondissement
de
Montréal.
Croyant
y
trouver
le
bonheur,
il
s'enlise
encore
davantage
en
exerçant
un
métier
peu
rémunéré.
Pour
oublier
sa
faillite
humaine,
il
sombre
dans
l'éthylisme,
qui
a
finalement
raison
de
son
âme
de
géant,
tel
un
albatros
qui
aurait
reçu
du
plomb
dans
une
aile.
Cette
défaite
aura
des
répercussions
sur
le
fils.
Abandonné
à
lui-même,
il
garde
quand
même
un
moral
exemplaire,
malgré
la
tache
de
vin
qui
lui
couvre
le
visage,
et
le
manque
de
scolarité
qui
freine
considérablement
ses
ambitions.
Heureusement,
la
tentative
de
son
père
pour
reconstituer
une
famille
lui
sert
d'occasion
pour
s'initier
à
la
photographie
avec
une
belle-mère
compatissante.
Fort
de
son
nouveau
savoir,
il
veut
retourner
dans
son
village
natal
puisque
Montréal
ne
lui
sourit
pas
plus
qu'à
son
père.
Avec
un
vieux
camion,
sur
lequel
on
peut
lire
en
grosses
lettres
"
because
of
sorrow
",
il
quitte
sa
vie
navrante
en
suivant
la
route
qui
longe
le
fleuve
Saint-Laurent.
Une
panne
d'essence
le
mettra
en
contact
avec
un
couple
d'étudiants
qui
se
portent
à
son
secours.
Et
voilà
qu'il
accepte
d'accompagner
la
jeune
femme
afin
de
répertorier
les
légendes
et
les
chansons
de
l'Est
du
Québec
tandis
que
le
jeune
homme
poursuit
sa
route
jusqu'à
la
mer
pour
terminer
un
soi-disant
essai.
Comme
dans
un
road
novel,
le
nouveau
tandem
parcourt
la
province
à
la
recherche
de
gens
âgés
encore
détenteurs
des
bribes
de
notre
patrimoine
folklorique.
Il
est
bien
payé
pour
ce
travail
en
plus
de
jouir
des
faveurs
intimes
de
cette
compagne
inespérée.
Mais
ce
qu'il
ne
sait
pas,
c'est
tout
ce
qui
se
trame
dans
son
dos.
Pourquoi
ces
jeunes
étudiants
se
consacrent-ils
à
ce
travail?
C'est
ce
qui
compose
la
deuxième
partie
de
l'œuvre.
Nous
entrons
au
cœur
de
ce
qui
a
formé
leur
personnalité.
Le
remords
et
la
violence
en
ont
fait
des
êtres
retors
et
démoniaques.
Après
avoir
eu
une
enfance
très
marquée
par
le
destin,
nous
comprenons
qu'ils
aient
sombré
dans
l'abîme
du
désespoir,
qui
est
à
l'origine
de
leurs
vengeances
pathologiques.
Dans
un
dernier
volet,
un
éclairage
psychanalytique
explique
leur
dérapage.
Cette
auteure
privilégie
toujours
cet
angle
pour
ses
oeuvres.
Ce
chaînon
est
agaçant.
Il
n'est
pas
nécessaire
d'appuyer
autant
sur
l'origine
des
malaises
existentiels
pour
faciliter
notre
compréhension.
En
gros,
elle
nous
promène
dans
le
temps
pour
établir
des
liens
entre
l'âme
des
héros
et
des
événements
du
passé.
La
déportation
des
Acadiens
en
1755
se
vit
dans
tous
ces
départs
des
jeunes
qui
quittent
leurs
familles
à
cause
des
malheurs
qui
se
sont
abattus
sur
eux.
Si
les
incidents
du
FLQ
de
1970
sont
rappelés,
c'est
davantage
pour
marquer
l'inefficacité
d'un
terrorisme
sauveur.
Tous
les
personnages
sont
aux
prises
avec
un
destin
défavorable.
Tous
réagissent
pour
se
libérer
:
certains
y
trouvent
la
mort,
d'autres
fuient
et
d'autres
récoltent
enfin
le
bonheur.
Mais
chacun
traîne
une
peine
bien
difficile
à
consoler.
Le
grand
nombre
de
personnages
ne
nous
égare
pas.
Même
s'ils
sortent
de
nulle
part
comme
Juliette,
ils
sont
tous
membres
d'une
même
famille
ou
le
deviennent.
C'est
une
histoire
noire,
voire
insupportable
par
moments.
Les
meurtres
et
les
suicides
se
succèdent
à
un
rythme
accéléré,
sans
conduire
cependant
vers
un
dénouement
apocalyptique.
Mais
il
n'y
a
pas
de
quoi
crier
"
Victoire!
".
L'écriture
est
à
la
hauteur
de
cet
ambitieux
projet
romanesque,
construit
à
la
manière
d'un
vitrail
dont
l'auteure
s'inspire
pour
illustrer
la
grisaille
et
la
lumière
de
la
vie.
Les
teintes
sombres
laissent
quand
même
filtrer
la
poésie
que
l'auteure
amalgame
à
celle
d'Aragon.
"
Si
le
monde
sévère
a
roulé
la
tête
à
l'envers
",
les
survivants
tentent
tant
bien
que
mal
de
valser
comme
Elsa
"
au
bal
des
hasards
".
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