Paul-André Proulx

Littérature Québécoise

Doucet, Patrick.

Foucault et les Extraterrestres. Éd. Triptyque, 2010, 104 p.

Le désenchantement contemporain

Situé à la fin du 22e siècle, ce roman d’anticipation, comme 1984 de George Orwell publié en 1948, évoque plutôt un monde familier ou presque. Sous un angle fantaisiste, l’auteur décompose ce qui crée le désenchantement contemporain.

Le héros de 104 ans, le professeur Foucault, jouit d’une réputation internationale comme anthropologue de l’espace. De ses nombreux voyages extraterrestres, il a surtout retenu la planète P, où les livres poussent dans les arbres. Pendant une escale terrestre, il décrit à sœur Chahine, une archéologue de 102 ans, la culture des Pés, une population qui maîtrise la terminologie de sa langue sans pouvoir parler. Ce canevas pose le problème de la connaissance que les charlatans et les pays totalitaires se disputent pour orienter les rouages de la civilisation à leur avantage. La religieuse risque de nuire à leur projet machiavélique avec sa découverte d’une version apocryphe de la bible, qui présente les chiens, comme des créatures créées à l’image de Dieu. Cette source subversive bouleverse les fondements du savoir d’autant plus que le monde canin, contrairement aux Pés, jouit du don de la parole.

Cette fable philosophique bouscule la possession tranquille de la vérité en empruntant les voies de la science-fiction et du fantastique. D’à peine cent pages, cette œuvre force la réflexion tout en amusant le lecteur. Mais l’écriture malhabile et la facture tortueuse du récit menacent de refroidir son enthousiasme. Dommage ! Ça repose pourtant des romans fantastiques primaires dans lesquels on s’arrache des royaumes dans des bains de sang.