Paul-André Proulx

Littérature Québécoise

Gagnon, Marie-Claude.

Murmures d'eaux. Éd. Hurtubise HMH, 2007, 134 p.

Les Parfums du désir

Le roman de Marie-Claude Gagnon nous initie aux odeurs qui restituent le paradis perdu. Avec une plume poétique, l'auteure précise l'âme des parfums. Ils ne s'opposent pas, comme dans l'œuvre de Patrick Süskind, selon la spatialité. Les odeurs agressives venant de la ville et les réconfortantes étant issues de la campagne. Chacune doit s'amalgamer à l'heure du jour pour cueillir l'intérêt d'autrui.

La parfumerie joue le rôle de l'entremetteuse qui conduit au cœur de l'autre. Ce n'est pas pour rien qu'Irène tente de composer le parfum qui convient à chacun pour atteindre cet objectif. En somme, c'est un roman qui laisse le désir se promouvoir à travers une science que Jean-Baptiste Grenouille, le héros de Süskind, a voulu mettre au point pour se rendre irrésistible.

Après une liaison saphique, la parfumeuse mène à bout l'expérience de l'ensorcellement d'un homme par ses produits. L'auteure le présente dans différents rôles fantasmatiques pour qu'il se révèle à l'être adorée sous tous ses aspects. La relation qui s'établit entre l'héroïne et son prétendant répond à la courtoisie d'un autre âge, voire du nouvel âge. C'est avec une délicatesse non feinte, qui peut en lasser plus d'un, que les cœurs s'atteignent. On ne crie pas son amour, on le murmure. Comme l'indique l'enseigne du commerce d'Irène, Murmures d'eaux est une parfumerie haut de gamme qui n'a rien à voir avec les essences prononcées et volatiles des marques bon marché. À l'instar des grands crus, elle cherche les odeurs subtiles du bois de chêne et des sous-bois qui retiennent les disciples de Cupidon.

L'auteure enseigne l'art de se dévoiler à l'être cher selon des stratégies raffinées pour que la volupté s'exprime avec grâce et sans pudibonderie. Roman pour celles qui ont l'âme à la tendresse et pour les machistes en quête de recettes de séduction.