Senez,
Sabica.
Nulle
Part
ailleurs.
Éd.
L'Instant
même,
2004,
112
p.
Relations
père-fille
À
lire
les
romans
québécois,
nous
pourrions
croire
que
la
province
entière
souffre
d'un
complexe
oedipien.
Avec
notre
mentalité
d'anciens
colonisés,
nous
sommes
en
quête
d'un
nouveau
père
que
seule,
selon
certains,
l'indépendance
peut
nous
offrir.
En
attendant
cet
événement
hypothétique,
les
romanciers
s'en
inventent
un
ou
le
condamnent
pour
les
avoir
abandonnés.
Sabica
Senez,
qui
en
est
à
sa
première
œuvre,
mais
que
son
éditeur
n'a
pas
cru
bon
de
nous
présenter,
suit
la
voie
tracée
par
Sylvain
Trudel
dans
La
Terre
du
roi
Christian
ou
encore
d'Andrée
Laberge
dans
Les
Oiseaux
de
verre,
deux
auteurs
qui
ont
démontré
les
effets
néfastes
du
père
absent.
Que
l'on
se
rappelle
aussi
l'essai
de
Guy
Corneau,
Père
manquant,
fils
manqué.
En
ce
qui
concerne
le
roman
de
Sabica
Senez,
Montréalaise
née
en
1970,
se
penche
sur
les
relations
père-fille.
Quinze
ans
après
la
mort
de
son
père,
la
narratrice
relit
la
dernière
lettre
qu'il
lui
a
envoyée
alors
qu'elle
était
adolescente.
Comme
elle
a
conservé
toutes
ses
lettres,
elle
les
relit
en
commentant
pour
le
lecteur
le
lien
qui
l'unissait
à
son
géniteur,
un
homme
divorcé,
qui
a
prolongé
son
adolescence
jusqu'à
la
mort
pour
protéger
sa
liberté.
Grand
bourlingueur
qui
parcourt
l'Amérique
et
l'Europe
avec
sa
moto,
il
entretient
une
relation
épistolaire
pour
ne
pas
perdre
l'amour
de
sa
fille
qu'il
a
abandonnée.
Ses
lettres
sont
anecdotiques,
mais
elles
s'enrichissent
légèrement
au
fur
et
à
mesure
que
l'héroïne
vieillit.
Cette
dernière
ne
suit
pas
de
chronologie
en
les
relisant.
Elle
choisit
sans
doute
celles
qui
l'ont
le
plus
touchée.
Chacune
éveille
en
elle
une
réflexion,
qui
tantôt
montre
l'attachement
d'une
enfant
à
un
père
qu'elle
idéalise
et
qui,
à
d'autres
moments,
révèle
sa
frustration
d'être
privée
de
la
présence
de
cet
homme
qui
savait
la
distraire.
À
ce
propos,
on
a
droit
à
des
passages
irrésistibles,
surtout
quand
il
lui
enseigne
à
faire
des
bulles
avec
du
chewing-gum
alors
qu'ils
se
promènent
sur
la
Terrasse
Dufferin
à
Québec.
Ces
rares
moments
ne
sont
pas
suffisants
pour
rasséréner
la
fillette.
Seule
la
mort
de
ce
voyageur
invétéré
pourrait
la
délivrer
de
son
désarroi,
qui
la
fait
osciller
entre
la
haine
et
l'amour.
Mais
comme
adulte,
les
lettres
de
son
père
revêtent
un
caractère
particulier,
car
ce
n'est
nulle
part
ailleurs
que
l'héroïne
pourrait
trouver
les
liens
de
la
filiation,
garants
de
la
paix
de
son
âme.
Ce
sont
des
mots
que
provient
le
salut
de
la
narratrice.
Ceux
de
l'auteur
en
témoignent
avec
justesse
et
simplicité
quoique,
à
l'occasion,
on
puisse
sentir
la
difficulté
de
s'empêcher
de
prendre
le
mors
aux
dents.
On
le
voit
aux
nombreuses
répétitions,
surtout
de
la
forme
interrogative
pour
souligner
les
doutes
de
son
personnage.
C'est
une
écriture
classique
qui
ne
fracasse
rien.
Au
niveau
de
la
forme,
le
roman
emprunte
des
sentiers
capricieux,
alternant
les
lettres
du
père
et
les
réflexions
éparses
de
sa
fille,
qui
ne
s'inscrivent
pas
toutes
dans
la
foulée
d'une
progression
conduisant
au
dénouement,
amené
d'ailleurs
comme
un
cheveu
sur
la
soupe.
C'est
quand
même
une
œuvre
valable,
qui
illustre
comment
les
enfants
paient
en
bout
de
ligne
la
note
des
divorces.
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