Bouchard,
Hervé.
Parents
et
amis
sont
invités
à
y
assister.
Éd.
La
Quartanier,
2006,
237
p.
Deuil
d'une
famille
du
lac
Saint-Jean
Hervé
Bouchard
esquisse
le
portrait
d'une
famille
du
Lac
Saint-Jean,
chamboulée
par
la
mort
subite
d'un
père
qui
laisse
dans
le
deuil
une
femme
et
six
enfants,
tous
des
garçons.
Tragédie
qui
désorganise
un
clan
animé
de
la
parole
paternelle.
"
Il
était
capable
de
dire
les
choses
d'alentour
et
de
les
faire
bouger
avec
son
air
d'aimer
les
déplacer
en
les
décrivant.
Nous
étions
à
l'étroit,
mais
il
ouvrait
la
bouche
et
nous
emmenait
avec
lui
où
on
manquait
pas
d'air
et
où
on
se
cognait
nulle
part.
"
Cette
œuvre
singulière,
issue
d'aucun
genre
en
particulier,
plonge
au
cœur
d'un
drame
qui
se
résout
alors
que
chacun
trouve
la
convergence
salvatrice.
Tâche
difficile
puisque
les
enfants
sont
dispersés
chez
des
tantes
qui
ont
pris
la
relève
de
la
mère,
sonnée
par
la
disparition
de
son
mari.
On
y
parvient
en
détournant
"
le
regard
d'autres
par
leurs
oreilles
qu'on
occupe
le
temps
que
l'être
qu'ils
ont
au
centre
leur
apparaisse
et
s'ouvre
en
parlant.
"
La
communication
sert
donc
de
thérapie
pour
reconstruire
les
assises
de
cette
famille
en
manque
de
filiation.
Manque
grave
à
l'origine
du
suicide
du
benjamin,
désireux
de
retrouver
son
père.
En
montrant
ainsi
la
face
cachée
de
ce
qu'ils
sont,
ils
resserrent
la
fratrie
sur
un
terreau
qui
leur
fait
dire
qu'ils
n'auraient
pu
vivre
ailleurs
avec
"
l'usine
au
large
de
leur
regard
dans
un
voile
de
fumée
qui
sentait,
la
poussière
en
gris
pâle,
l'asphalte
conjugué
en
mou,
les
poteaux
gros
de
créosote,
les
murs
en
brique
teintée
en
trente,
les
escaliers
premiers
du
nom,
des
corneilles
bleues,
des
moineaux
à
motifs...
des
érables
à
hélices,
des
saules
en
phase
brune,
des
peupliers
prêts
à
neiger,
des
ormes
à
bras,
des
sorbiers
portant
grappes,
des
pommetiers
en
pleurs,
des
cerisiers
à
romances...
"
Cette
parole
thérapeutique
renvoie
à
la
possession
du
corps,
instrument
de
connaissance
de
soi,
comme
l'avait
déjà
démontré
Élise
Turcotte
dans
La
Maison
étrangère,
roman
inspiré
de
l'esprit
du
Moyen
Âge
qui
considérait
notre
enveloppe
charnelle
comme
le
chemin
vers
autrui,
et
même
vers
Dieu
tel
que
le
prouvent
les
fresques
de
la
chapelle
Sixtine.
Par
contre,
Hervé
Bouchard
valorise
plutôt
le
corps
pour
ses
fonctions
d'évacuation.
L'intimité
des
actes
qui
en
découlent
prend
des
proportions
obsessionnelles
comme
dans
le
film
Léolo.
Ce
volet
scatologique,
qui
a
coûté
le
poste
de
Guy
Fournier
à
Radio
Canada,
stigmatise
notre
appartenance
à
une
humanité
déchue
à
travers
la
symbolique
des
fèces,
traduite
en
termes
vulgaires.
Comme
Job
sur
son
tas
de
fumier,
l'orphéon
des
endeuillés
clament
leurs
doléances
afin
de
se
réapproprier
une
famille
privée
de
son
âme.
Leurs
chants,
aussi
sacrilèges
que
les
Versets
sataniques
de
Salmon
Rushdie
avec
les
"
Hosties
de
Christ
"
pour
désigner
l'eucharistie,
célèbrent
la
parole
structurante.
Hormis
la
vulgarité
et
l'irrévérence,
cette
œuvre
brillante,
mais
déstabilisante
par
l'illustration
intellectuelle
de
sa
thématique,
rappelle
l'écriture
des
penseurs
du
XV1e
et
du
XV11e
siècle,
revisitée
parfois
par
les
Loca
Locass
:
"
S'ils
sont
sans
char,
ce
sont
des
chiens,
des
chiens
sans
char
dans
leur
maison
sans
horizon.
"
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